François Hollande: Toi Président!

Lors du débat présidentiel du 02 mai 2012, François Hollande prononça un discours phare: trait d’union à son accession à la présidence de la République. Son intervention fut à charge de son concurrent direct. Sa stratégie politique était une stratégie de rupture: pour exemple, éviter toutes formes d’interventionnisme dans sa fonction, comme la nomination «des directeurs de chaines de télévision», l’assurance d’une justice indépendante, ainsi que son recul vis à vis des parlementaires, notamment leur convocation à l’Élysée. In fine, son intervention avait pour objectif de mettre en accusation les dérapages de Nicolas Sarkozy, et de rassurer les électeurs sur l’émergence d’une présidence de fracture: exercer son mandat avec humilité, exemplarité et respect des institutions, au service des Français.

Photo Mathieu Delmestre / Solfé Communications https://www.flickr.com/photos/partisocialiste/6948165868/in/photolist-bzZaDf-bzZbHf-bzZbTh-awmDAV-bzZapN-bzZb4m-biQo6x-d9uhMQ-eLWWzw-8w3pqB-fFmMut-jrPqhz-bcadJP-jd8qPL-hDc7xk-hDaX4L-hDaX7b-biQn4c-bNTPfX-biQoer-biQnWi-biQor4-biQnst-biQniv-biQmLZ-biQnbZ-biQnzK-bq2fLV-awmzxc-awpfyC-biQoHV-biQmVr-biQnKB-biQozn-bgPRrF-bs4FrD-biQoSK-9w8UCy-exMdjB-agMnov-bwdJ6x-bs4FD6-biQpcx-bs4E2i-biQpD2-bs4Bjt-bs4CDX-bs4Cdk-biQpuD-biQpkD-bs4Csr/

Ce candidat qui souhaitait devenir le Président de tous les Français, déclarait ne pas vouloir être «le chef de tout (…) et en définitive responsable de rien»[1]. Clairement, il est parvenu à être différent de son prédécesseur. Toutefois, il a oublié l’essentiel de sa mission: relever le pays, du point économique et social.

François Hollande clamait tout au long de sa campagne électorale que «le changement [c’était] maintenant», martelant être proche du peuple, afin de l’accompagner. Ses discours et sa silhouette moins conformiste tranchaient avec les habitudes de la traditionnelle monarchie républicaine, comme si les Français regrettaient d’avoir coupé la tête de Louis XVI. A mi-parcours, François premier, le républicain, ne séduit plus, et se doit de relever le défi de la désespérance de ses concitoyens. Plus d’idées irrationnelles, le défi est désormais de rétablir la confiance, de régler le problème épineux du chômage, et de redresser une économie en perte de vitesse. A défaut de la «déroute c’est maintenant».

En effet, deux ans et quelques mois plus tard, le chef de l’état a été marqué par des torrents de scandales politiques, de promesses inassouvies, de fugues amoureuses et de piètres résultats. Selon, un sondage IFOP paru dans le Journal Du Dimanche, sa popularité n’excèderait pas 13% de confiance, soit un score historique sous la Cinquième République[2]. Bref, François hollande est désormais en panne de scooter. D’autant qu’un relent de Quatrième République plane au-dessus de la tête du locataire de l’Élysée. L’idée d’un exécutif fort, mis en place par Charles de Gaulle, part en vrille: d’où la cacophonie chez les ministres. Le gouvernement géré par Manuel Valls manque singulièrement de cohésion et de solidarité. Pour exemple: Arnaud Montebourg, opposé à toutes idées d’austérité, les qualifiant «d’idéologies destructrices»[3]. Quant à Christiane Taubira, garde des sceaux, elle fit une apparition brève, mais tonitruante au rendez-vous des frondeurs lors de l’université d’été du PS d’août 2014. Désormais, Manuel Valls tente de recadrer la liberté  d’expression de ses ministres, s’il est permis de croire que cette faculté puisse être un droit, sans affecter la stabilité gouvernementale. D’où une valse des ministres, puisque, n’en déplaise à l’UMP, Valls 2 est dans la continuité du précédent.

Christian Jacob, président du groupe UMP à l’assemblée nationale, se gausse de relever que Manuel Valls aurait dirigé «le gouvernement le plus éphémère de la 5eme République: 147 jours»[4].  Tant mieux, pour une fois que le président taille dans le vif! Un jeu de chaises musicales qui fait le bonheur de la critique opportuniste de l’UMP, qui elle aussi prend l’eau. Cela fait du bien au cœur de la droite conservatrice, elle aussi noyée dans de nombreux scandales.

Nonobstant que Manuel Valls, en déplacement outre-rhin, a un peu enfilé les perles auprès de Mme Angela, prétendant que «la France avance. Elle se met en mouvement»[5]. Une formule plutôt alambiquée. Effectivement, il est complexe d’avancer, avant de se mettre en mouvement. Mais ne polémiquons point sur la rhétorique!

credit : fondapol - fondation pour l'innovation politique  https://www.flickr.com/photos/fondapol/4554409882
credit : fondapol – fondation pour l’innovation politique
https://www.flickr.com/photos/fondapol/4554409882

D’un point de vue de l’ambiance politique, l’extrême droite flirte dangereusement avec les lignes démocratiques. Marine Le Pen, Présidente en herbe, séduit les Français qui ont curieusement le portefeuille social à gauche et la trésorerie à droite, de même que le sentiment d’une xénophobie latente ne cesse de se répandre. Le Front National gagne ses lettres de noblesse au Parlement européen sans parvenir à séduire et à rassembler ses acolytes étrangers de l’extrême. Cerise sur le gâteau, le FN fait une entrée modeste mais historique au sénat: une institution considérée comme le temple des sages[6]. Les Français ont peut-être le gout des extrêmes, mais le virage devient dangereux pour tous les démocrates.

Que penser de cette montée régulière de l’extrême droite dans le paysage politique de la République, mère des droits de l’Homme? Proche du peuple, François Hollande aurait-t-il enfanté le diable? Une présidence qui vire au paranormal! Le gag est que Marine le Pen se déclare elle aussi proche du peuple et puise dans la social-démocratie pour faire passer son idéologie xénophobe. La faute aussi à l’UMP, toujours assise entre deux chaises.

En conclusion, un seul homme ne fait pas la beauté d’un pays: les Français réussiront-ils à se ressaisir, entre tentation diabolique et confirmation des idéaux du pays des droits de l’homme, exportés jusque dans la charte des Nations Unies? Certes, s’il faut redonner confiance aux Français, il faut aussi que ceux-ci se reprennent en mains, et cessent de croire qu’à défaut d’état providence, le repli sur eux-mêmes leur garantira un avenir digne de leur prestigieuse histoire. Le mal n’est-il pas fondamentalement sur la capacité des Français à changer de siècle, même si ses têtes pensantes sont parmi les plus remarquables du monde? Que le peuple finisse par reprendre le bon chemin, sa détermination et son envie de se distinguer. Sauf de se remettre cruellement en question sur son modèle spécifique: le gouvernement ne fait que refléter l’immobilisme de ses administrés et la peur du lendemain.

La France se trouve à un tournant décisif de son histoire: elle doit se restructurer de fond en comble, et moderniser ses valeurs fondamentales. En référence à Jean Ferrat qui chantait le «grand soleil d’été qui courbe la Provence, des genêts de Bretagne aux bruyères d’Ardèche, quelque chose dans l’air a cette transparence et ce gout du bonheur qui rend ma lèvre sèche», les Français doivent capitaliser sur leur histoire, tout en se réformant. Pour l’heure, ils ont la lèvre sèche et la dynamique en berne.

 


 

[1] “François Hollande – “moi, Président De La République”” Dailymotion. 20Minutes, 3 May 2012. Web. 9 Oct. 2014. <http://www.dailymotion.com/video/xqjroz_francois-hollande-moi-president-de-la-republique_news>.

[2]“François Hollande Perd Quatre Points De Popularité.” Le Monde.fr. Le Monde.fr, 21 Sept. 2014. Web. 9 Oct. 2014. <http://www.lemonde.fr/politique/article/2014/09/21/la-popularite-de-francois-hollande-continue-de-chuter_4491458_823448.html>.

[3] “Montebourg Et Hamon Défient Hollande Et Valls Mais Assurent être “loyaux”” Le Huffington Post. Le Huffington Post, 24 Aug. 2014. Web. 9 Oct. 2014. < http://www.huffingtonpost.fr/2014/08/24/montebourg-hamon-defient-hollande-valls-loyaux-gouvernement_n_5704597.html >

[4] “C. Jacob (UMP) : “Mr Le Premier Ministre, Vos Jours Sont Comptés”” Www.itele.fr. Itele, 16 Sept. 2014. Web. 10 Oct. 2014. <http://www.itele.fr/politique/video/c-jacob-ump-mr-le-premier-ministre-vos-jours-sont-comptes-93637>.

[5]Rovan, Anne. “Valls Fait Campagne En Allemagne Pour Redorer L’image De La France.” Le Figaro. Le Figaro, 23 Sept. 2014. Web. 10 Oct. 2014. <http://www.lefigaro.fr/politique/2014/09/23/01002-20140923ARTFIG00366-valls-fait-campagne-en-allemagne-pour-redorer-l-image-de-la-france.php>.

[6]Galiero, Emmanuel. “Le FN Fait Une Entrée Fracassante Au Sénat.” Le Figaro. Le Figaro, 28 Sept. 2014. Web. 10 Oct. 2014. <http://www.lefigaro.fr/politique/2014/09/28/01002-20140928ARTFIG00185-le-fn-fait-une-entree-fracassante-au-senat.php>.