Négociations du Brexit: l’avenir de l’économie britannique menacé

Alors que le 29 mars 2019 approche, marquant la sortie officielle du Royaume-Uni de l’Union Européenne, aucun accord pour maintenir des relations socio-économiques favorisées entre le pays et l’Union n’a encore été signé. Le Brexit est imminent et beaucoup redoutent les conséquences désastreuses qu’aurait un Brexit sans accord (“no-deal” Brexit) sur l’économie et le commerce anglais. La possibilité de plus en plus réaliste qu’aucun accord ne soit signé créerait un choc pour l’économie Britannique, ce que beaucoup stipulent, et plongerait certainement le pays dans une période de récession. 

Si, en effet, aucune entente n’aboutit avec l’Union Européenne, le Royaume Uni ne bénéficiera plus de relations commerciales privilégiées avec le reste de l’Europe et, au contraire, devra suivre les règles établies par l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Dès lors, la circulation libre des biens entre le Royaume-Uni et l’Union Européenne cesserait immédiatement. En outre, les grandes entreprises ayant des actifs en Grande-Bretagne verraient la mise en place de contrôles aux frontières et de tarifs sur tous leurs imports et exports. Ces dernières seraient aussi forcées de s’adapter aux nouvelles notices techniques du gouvernement Britannique, en investissant par exemple dans de nouveaux systèmes informatiques leur permettant de traquer leurs produits à travers les frontières. Ces nouvelles mesures représentent non seulement de nouveaux délais additionnels, mais, plus généralement, une augmentation de leurs coûts de production et de distribution.

Manifestation anti-Brexit sur la place du Parlement à Londres le 9 octobre 2018.

En restant au Royaume uni, ces compagnies devront affronter de nouveaux défis diminuant leur habilitée à rivaliser avec d’autres entreprises sur le marché international. Ainsi, beaucoup se demandent aujourd’hui si la meilleure stratégie commerciale ne serait pas de relocaliser leurs actifs hors du Royaume Uni.

En effet, plusieurs grandes entreprises dirigeant des opérations au Royaume Uni, ont annoncé que si aucun accord n’était signé entre l’Union Européenne et le gouvernement anglophone, elles prendraient de nouvelles dispositions telles que des coupures budgétaires, des arrêts de production temporaires et la délocalisation d’usines hors du Royaume-Uni. Dans un sondage en août dernier de 2500 compagnies à travers le Royaume Uni, un cinquième d’entre elles ont répondu qu’à la suite d’un no-deal Brexit, elles délocaliseraient  une partie ou la majorité de leurs actifs en Europe. Ce sondage est alarmant car cela représenterait une grande perte du produit intérieur brut (PIB) Britannique, plongeant le pays dans une période de récession.

Par exemple, dans l’industrie de la production, Toyota est le dernier géant automobile à critiquer un Brexit sans accord. Lors du Salon International de l’automobile à Paris, le chef de Toyota Motor en Europe, Johan van Zyl a déclaré, “The reason for many manufacturers being in the UK is the fact that they could export to the European market duty free – and that is a critical one”. Il a de même ajouté qu’un Brexit sans accord aurait “an impact on our competitiveness of manufacturing in the UK” et pousserait le groupe automobile à repenser “future investment decisions”. En d’autres mots, le groupe pourrait restreindre sa production au Royaume Uni et, au contraire, la redistribuer vers des sites plus avantageux d’un point de vue économique.

Concernant leur usine d’assemblage à Burnaston (Derbyshire) produisant environ 150 000 véhicules par an, lesquels sont destinés à 90% à l’export vers des pays en Europe, Mr van Zyl fait remarquer que “The UK market in itself is not big enough to justify a plant that size”. En effet, si Toyota Motor ne pouvait pas vendre librement ses véhicules sur le marché européen, une production britannique de cette envergure ne serait plus lucrative et le groupe considérerait un arrêt provisoire de production de l’usine Burnaston pendant plusieurs mois, mettant conjointement ses 620 employés à l’arrêt. De telles fermetures représentent des pertes d’emplois et de revenus pour le gouvernement britannique, ralentissant ainsi l’économie du pays.

Tout comme Toyota, d’autres grandes entreprises automobiles comme BMW, Jaguar et Honda ont annoncé d’éventuelles fermetures de plusieurs sites de production afin de minimiser leurs pertes si aucun accord de Brexit ne venait à être signé. Selon The Society of Motor Manufacturers & Traders (SMMT), les investissements dans le secteur automobile ont connu une réduction de 50% depuis le début de 2018 et ont atteint des niveaux aussi bas que lors de la crise économique de 2008.

Rapportant chaque année près de 10% du PIB Britannique et des millions d’emplois à ses citoyens, le secteur de production est un des points forts de l’économie Britannique. Greg Clark, Secrétaire d’État aux Affaires, regrette les éventuelles coupures budgétaires dans ce secteur suite à un no-deal Brexit qui, selon lui,  “would reduce our competitiveness”, mais aussi “would reduce the number of cars made in the UK and that would cost jobs”. Étant un des piliers majeurs de l’économie britannique, Mr Clark déplore que de telles pertes économiques dans ce secteur est “something we would regret forever”.

Theresa May, la premiere ministre britannique, négocie actuellement les termes du Brexit.

 

Alors que Theresa May, la Première Ministre britannique, continue d’affirmer que “no deal is better than a bad deal”, de nouvelles divisions naissent entre les élus du gouvernement anglais. De plus en plus de ministres critiquent ouvertement la première ministre anglaise et son inefficacité face à la tournure des négociations du Brexit. Claire Perry, la ministre des affaires anglaise, a ouvertement contredit les affirmations de la première ministre, en exprimant “no deal is a recipe for a catastrophic series of consequences”. Mme Perry ajoute qu’un Brexit sans accord est “also a way of crashing the economy and of doing great damage to our most productive industries”, comme les secteur aéronautiques, automobile et l’échange de services financiers.

En effet, en 2017, 44% des échanges commerciaux du Royaume-Uni se font avec des pays de l’Union Européenne. Un “no deal” Brexit affecterait la production et la distribution des produits européens au Royaume Unis et augmenterait considérablement les coûts des grandes compagnies présentes en Grande-Bretagne. Considérant l’interdépendance économique de la Grande-Bretagne avec l’Europe, un manque de consensus à Bruxelles aura donc pour conséquence une baisse soudaine du PIB Britannique. Un tel choc économique engendrerait une période de récession d’une durée incertaine.

La date officielle de fin des négociations approchant, et le manque de clarté dont le gouvernement britannique fait preuve face au Brexit, font interroger beaucoup de résidents britanniques. Le Royaume-Uni a décidé de quitter l’Union Européenne en pensant qu’ils y gagneraient, mais pourront-ils en dire autant.

Edited by Laura Millo